Le texte ci-dessous a été lu au début du rassemblement (collectif « Unissons Nos Différences »)

Trois jours de cauchemar, trois jours de folie meurtrière, trois jours qui marqueront à jamais notre mémoire.

Il y aura un avant et un après 7 janvier 2015. Pour les familles endeuillées, pour Charlie Hebdo, pour la presse, pour la France et le monde entier, pour chacun(e) de nous….

Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Honoré, Oncle Bernard, il nous faut faire le deuil de votre disparition tragique et injuste, intégrer en nous-mêmes que nous n’aurons plus à découvrir chaque mercredi vos dessins, caricatures et autres chroniques au sein de Charlie Hebdo….Vous avez été assassinés parce que vous aviez du talent, parce que vous étiez impertinents, parce que vous osiez interpeller les bien-pensances, le confort moral et l’ordre établi….Sans tabou ni manque de respect car vous étiez des hommes de grande culture. Comme l’a exprimé votre collègue Chaunu dans Ouest-France d’hier « Il n’y a pas de caricature sans culture ».

Vous usiez d »armes »pacifiques : le crayon, la plume, la dérision pour éveiller -réveiller- nos consciences parfois endormies, anesthésiées par le politiquement correct, la langue de bois, les infos pré-mâchées des chaînes de télévision…

Les barbares illuminés, eux, ne savent manier que les vraies armes, celles qui tuent au lieu de faire réfléchir, celles qui assassinent ici en France et ailleurs dans le monde. Ils ont perdu tout sens de l’analyse, tout sens critique, ils ne connaissent que le 1er degré, l’humour et la dérision c’est trop pour eux…

Si nous nous rassemblons ici c’est pour vous rendre hommage, à vous six, mais aussi aux onze autres victimes qui sont tombées ces derniers jours : Frédéric Boisseau, Elsa Cayat, Michel Renaud, Mustapha Ourad, Ahmed Merabet, Franck Brinsolaro, Clarissa Jean-Philippe, Yohan Cohen, Yoav Hattab, Philippe Braham, François-Michel Saada. Sans oublier nos concitoyens lâchement assassinés en Afrique du Nord, Afrique subsaharienne et en Somalie ces dernières années…. C’est pour marquer notre compassion auprès des familles endeuillées et notre solidarité envers les journalistes et la presse en général…

Pour dire et redire que nous ne laisserons pas mettre à mal les valeurs de la République.

Nous sommes un pays de liberté, d’égalité et de fraternité. Ces valeurs républicaines, il nous faut les préserver et les faire vivre, concrètement, à travers nos comportements individuels et collectifs ainsi que par nos engagements personnels.

Nous vivons dans une République laïque. La laïcité c’est la garantie du vivre-ensemble, de la préservation de toutes les libertés : liberté de croire ou de ne pas croire, liberté de la presse, liberté de création artistique….

Si un citoyen s’estime discriminé, s’il estime être victime de comportements inadaptés, s’il estime qu’un écrit, qu’un dessin, qu’une caricature porte atteinte à sa philosophie de vie, sa spiritualité, sa religion, la Loi est là pour trancher, la Loi de la République, pas la loi issue d’une théologie…

La loi républicaine est là pour préserver et protéger.

Il nous faut donc combattre avec résolution et détermination les ennemis de la démocratie et de la République. Sans faille. Les combattre en allant aux racines du mal, en cherchant à comprendre et à se préserver de telles dérives idéologiques et fanatiques.

A nous d’être suffisamment responsables pour ne pas désigner des boucs émissaires, pour éviter la stigmatisation de telle ou telle partie de la population de notre pays. Aux différentes religions et spiritualités de prôner les valeurs de respect, d’altérité, d’être à l’écoute des uns et des autres, d’empêcher et de condamner toute déviance extrémiste ou fondamentaliste.

Rien de durable ne peut se construire sans éducation. Sans accompagnement de l’autre, sans écoute, sans transmission de connaissances et de repères on ne peut comprendre le monde qui nous entoure. Et si on ne comprend pas le monde qui nous entoure, si on ne nous a pas donné les clefs pour s’y insérer et y trouver sa place on peut s’y perdre et s’égarer attiré par des chimères illusoires et sans lendemains… »Celui qui ouvre une porte d’école ferme une prison » nous disait Victor Hugo.

Tout le monde est concerné, tous les éducateurs, les parents, les enseignants, les animateurs, les associations, les collectivités de tous étages….pour faire que la France ne soit pas une addition de communautés mais demeure une société ouverte, diverse, tolérante, plurielle et respectueuse des différences…